« The Villains » Yves Lacroix
« The more successful the villain, the more successful the picture » Alfred Hitchcock
L’univers du polar a ceci de fascinant qu’il réveille nos peurs secrètes, notre fascination enfouie pour le « mal », cette fascination que nous dominons mais qui peut resurgir à tout moment. Plus jeune je remarquais : les James Bond sont meilleurs quand le méchant est fort et charismatique. Je m’appelle Yves Lacroix, je suis photographe et je crois être né pour créer des univers. Des univers auxquels je donne naissance par des images. Des photographies. Ces visions sont comme des représentations arrêtées d’un film qui se projette en moi. Je suis un photographe et je rêve de cinéma. Réalisateur d’images fixes, je rêve que ces instants figés s’animent. Je suis amoureux de quasiment chacun des plans des films de Sergio Leone, maître absolu du genre, mais aussi des thrillers de Nicolas Winding Refn, David Lynch ou encore Na Hong-jin. Mon univers est habité par cette culture du film. Avec la série « The Villains », sur laquelle je travaille depuis plus de dix ans, j’avais envie de créer une image cinématographique, un hommage à ces personnages antagonistes. Dans ces photographies, j’élabore des scènes de film, je crée des images arrêtées que je veux fortes, impactantes, tendues et parfois paraboliques. En prenant le spectateur par la main je l’amène à la croisée des chemins, c’est ensuite à son esprit d’imaginer le film de cette histoire. Pour cela, je lui fournis une quantité d’indices, en enrichissant l’image au maximum, en soignant chaque détail – la mise en scène, bien sûr, mais aussi ¬la lumière, le décor, l’atmosphère. Je donne aussi à chaque photo un titre. Ce « cinéma », qui est né dans ma tête, déroule ensuite son scénario dans la tête du spectateur. C’est à lui de finir le film à son corps défendant ou pour son plus grand plaisir. Un souffle nouveau est ainsi donné aux obsessions et fantasmes qui sont les miens. Car, au fond, ce que nous définissons comme le « mal » est une notion variable, une valeur morale qui peut être considérée sous différents angles. Un individu peut sembler effrayant ou assassiner, est-il pour autant forcément un désaxé ? Où, alors, se situe réellement le « mal » ? C’est l’un des points de départ de mon travail : mêler violence, absurde, ironie, cauchemars mais aussi réflexion sur notre société afin que le spectateur puisse aussi parfois remettre en question ses propres préjugés. C’est pourquoi je tente d’éprouver toutes les formes du « mal ». Et comme dans tous les bons polars, pour que l’univers d’une histoire soit réellement fascinant, Il faut qu’on ait affaire à un « vrai méchant ». Plus le « vilain » s’avère cruel et maléfique, plus la puissance d’un film s’en trouve décuplée et son héros grandi. C’est tout cela que ma série « The Villains » tente de mettre en lumière.